Réinventer les réunions à l'heure du numérique
Les outils numériques et leurs usages ont été poussés dans les entreprises par la crise sanitaire...
par Laurent Mahieu, secrétaire général CFDT Cadres
Réinventer les réunions à l'heure du numérique. Tel est le titre d’un document Repère « Futurs du travail » n°8 produit par la chaire FIT². Il fournit des données sur la qualité et la quantité de réunions avant et après la crise sanitaire et analyse la pertinence de certains outils numériques. Un document utile pour le travail professionnel et syndical quand on passe 6 semaines par an en réunions diverses !
La chaire FIT2(Futur de l’Industrie et du Travail) produit, encourage et valorise des études sur les futurs possibles de l’industrie et du travail, ainsi que sur les politiques d’accompagnement de ces transformations. Elle analyse des pratiques d’innovation, de formation, d’amélioration de la qualité du travail et d’organisation de l’action collective.
Huit documents Repère ont notamment été élaborés à partir d’expériences concrètes.
Ces analyses sont d’autant intéressantes que le sujet de la qualité des réunions et celui de leur « capacité » de décisions est souvent mis en avant :
- Dans le baromètre KANTAR / CFDT Cadres 2019 61 % des cadres jugent prioritaire ou très important le fait de pouvoir passer moins de temps en réunion,
- La revue Cadres y revient dans son dernier numéro dans un article intitulé « Décider à plusieurs » (larevuecadres.fr).
Pour donner l’envie d’une lecture complète, voici quelques extraits du Repère n°8 :
Optimiser les réunions : un défi ancien
Depuis longtemps, la mauvaise qualité des réunions est un point noir dans les organisations. Une enquête, conduite en 2017 par Opinionway dans des entreprises de 500 salariés et plus, montrait que les salariés assistaient en moyenne à plus de deux réunions par semaine pour une durée totale cumulée de 4,5 heures. Leur nombre passait à 4,3 réunions hebdomadaires pour les cadres. Les salariés passaient ainsi 3 semaines par an en réunion et les cadres, plus de 6 semaines. Pourtant, à peine la moitié de ces réunions étaient considérées à l’époque comme productives.
[..] En octobre 2021, près de la moitié des cadres interrogés (46 %) par l’Ifop déclarent assister à 5 réunions et plus par semaine, soit un doublement net comparé à une enquête menée sur le même thème en 2015. Dans le détail, ce sont les cadres appartenant à des entreprises de grande taille (plus de 500 salariés) qui participent au plus grand nombre de réunions par semaine (6,3 en moyenne) quand ceux travaillant pour de plus petites entités (moins de 50 salariés) n’en n’effectuent que 2,7 du fait de la moindre dispersion.
Une autre étude récente indique en outre que les managers récemment promus tendent à organiser un tiers de réunions en plus par rapport à leurs collègues plus expérimentés, sans doute pour prendre leurs marques et s’imposer vis-à-vis de leur équipe.
[..] Dans le match entre présentiel et visio, les cadres ne sont qu’une courte majorité à marquer leur préférence pour le présentiel, cette préférence variant de plus avec l’âge des répondants.
Les réunions en mode hybride (on parle aussi de réunions « asymétriques ») sont venues encore compliquer la donne, au point que pour un certain nombre de nos interviewés la simultanéité présence/distance en réunion est une modalité à éviter autant que possible.
… Pour contrer les défauts des réunions hybrides, certaines organisations mettent en place des routines de réunion alternant tout-présentiel et tout-distanciel selon la nature des réunions. La réflexion consiste ici à déterminer quel mode est le plus favorable pour quel type de réunion
[..] Conclusion
Il semble aujourd’hui bien établi que le travail à distance a globalement fait augmenter le nombre de réunions et baisser leur durée. Mais celui-ci n’est pas la seule raison de cet accroissement quantitatif. Les modèles d’organisation favorisant la montée en autonomie des équipes et la réduction de la place des managers (de type holacratie, entreprise libérée, organisation plate, etc.) jouent également un rôle dans cette multiplication.
[..] Il est toutefois possible de mettre en place des mécanismes pour contrer ces effets pervers. Les espaces de travail numériques offrent ainsi de multiples possibilités de combiner l’action synchrone et asynchrone, présentielle et à distance, individuelle et collective, pour faire baisser le nombre et la durée des réunions. Mais cela nécessite un temps d’apprentissage réel.
Si les outils numériques portent en eux des potentialités, c’est fondamentalement la réflexion sur les processus organisationnels qui permettra de gagner en efficacité."
+ d'infos
Chaire « Futurs de l’industrie et du travail - Formation, innovation, territoires