Management et organisation

La production immatérielle redessine l’organisation du travail

20 déc 2012

Comment organiser la coopération et la diversité ?


Si l’économie de la connaissance est une expression récente (début des années 2000 avec la ‘’nouvelle économie’’), Peter Drucker définissait un travailleur du savoir (knowledge worker) comme celui ‘’qui met en œuvre ce que son éducation a appris, c'est-à-dire des concepts, des idées et des théories plutôt que des compétences manuelles ou musculaires’’. Impossible à quantifier, donc. Mais cela dépasse le monde des cadres. Les travailleurs du savoir sont aujourd’hui majoritaires dans le monde actif. Ainsi, 75% du produit intérieur brut en France provient des secteurs des services et de l’information au sens large. Si la part de la production et de la transformation des matières premières diminue, le concept dépasse les secteurs. Une voiture, ce n’est pas seulement un assemblage physique. C’est surtout de la recherche, de la vente et du service. Quelle est la principale activité de Renault ? demanda Carlos Ghosn à ses cadres dirigeants lors de son premier meeting. Réponse : concevoir et fabriquer des voitures ? Non, répondit le stratège : les vendre. Et si possible à crédit. L’économie de la connaissance marque le développement de la production dite ‘’immatérielle’’. C'est-à-dire de l’information échangeable sur le marché. Mais, plus largement, la recherche-développement et innovation, l’éducation et les technologies de l’information et de la communication, le capital humain ou encore la stratégie organisationnelle font partie du patrimoine immatériel d’une société.
 

75% du produit intérieur brut

En entreprise, la production immatérielle déplace l’organisation traditionnelle du travail. Le salariat est né du louage de service, séparant le travail de la personne. D’où la division du travail entre ceux qui étaient payés pour ‘’penser’’ et les autres pour ‘’produire’’. Or, la connaissance est attachée à la personne. Le travail intellectuel et son débouché n’est pas mesurable ou dénombrable. Il n’est pas divisible, donc. Comment alors l’organiser ? Comment le motiver ? Comment le rétribuer ? Dans l’organisation industrielle, on payait du temps et de la disponibilité. Aujourd’hui la valeur du travail est fixée par la valeur marchande du produit ou du service.

Ainsi, dans le contexte de spécialisation des tâches, de réduction des coûts et de gabegie procédurière, comment lier maximisation du profit et richesse immatérielle ? Combien d’entreprises organisent un véritable management de la connaissance ? Comment mesurer et breveter une connaissance ? L’organisation de la performance collective est donc un chantier complexe. On ne peut pas opposer un objectif de performance individuelle. Le mérite est individuel mais pas la compétence. C’est son usage dans un cadre collectif qui est peut être mesurable. Plus le travail est intellectuel, plus la performance est collective aurait-on envie de dire. Mieux vaut donc organiser la solidarité entre travailleurs intellectuels et ce dans la durée : qualité de la coopération, de espaces de bureau, de l’ergonomie des outils… mais aussi développement des compétences et mise à niveau permanente. Si on ne sait pas mesurer, autant organiser la diversité. Enfin, à défaut d’évaluation objective, on peut aussi développer la propriété intellectuelle (édition, label, brevet) comme reconnaissance hors temps du travail immatériel. La nouvelle économie redessine l’organisation du travail. Et son management les contours de la croissance.
 

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