Pour une alerte responsable
Combien de catastrophes financières, écologiques, sociales et sociétales auraient pu être évitées si les mesures adéquates avaient été prises à temps ? Par Jean-Paul Bouchet, Secrétaire général.
En créant des dispositifs d’alerte professionnelle, les employeurs se sont trop souvent engouffrés dans des démarches unilatérales, en négligeant l’existant : les organisations syndicales et les instances représentatives du personnel. Ils ont tort. La CFDT Cadres revendique une alerte responsable qui concerne tous les risques afin que la question de la responsabilité professionnelle, un fondement de la fonction cadre, puisse être pleinement assumée dans un environnement protecteur.
Enron, Azf, Lehman Brothers, mais bien avant Union Carbyde... Combien de catastrophes financières, écologiques, sociales et sociétales auraient pu être évitées si les mesures adéquates avaient été prises à temps, si les corrections des dysfonctionnements avaient été opérées plus tôt ? Si tous les salariés sont potentiellement concernés par ces questions, les cadres, les managers sont souvent en première ligne en tant que décideurs, acteurs ou réalisateurs de la mise en oeuvre des choix des entreprises et administrations. La question de l’alerte professionnelle renvoie inévitablement à la question de la responsabilité professionnelle, un fondement de la fonction cadre. une responsabilité qui ne doit pas se jouer au seul moment de la mise en cause, de la mise en examen ou celui de la recherche des coupables mais bien au moment de la décision et de sa mise en oeuvre. Lorsque les exigences deviennent insupportables, irréalisables, les cadres jouent trop souvent les funambules en jonglant avec les contraintes, les contradictions et les règles de sécurité.
Ces derniers mois, plusieurs entreprises se sont engagées dans des démarches unilatérales de mise en place de systèmes d’alerte professionnelle, d’alerte éthique ou de whistleblowing, souvent pour satisfaire des obligations légales. Force est de constater que dans bien des cas, elles n’ont pas pris le sujet par le bon bout, multipliant les maladresses, les fautes de procédures, d’information et de consultation des institutions représentatives du personnel ou de déclaration à la Cnil… Pas étonnant dans ce contexte que se soient multipliés les conflits et les recours juridiques. Pas étonnant non plus que les organisations syndicales aient dénoncé des systèmes de dénonciation ou même de délation organisée.