Les promesses de l’économie de la fonctionnalité
Industrie stimulée par les services, management plus coopératif : du neuf dans l’organisation du travail.
Connaissez-vous l’économie de la fonctionnalité ? ‘’C’est la vente d’une solution adossée à une performance contractualisée, et fondée sur l’usage d’un ensemble intégré de biens et de services, en substitution à leur production et leur commercialisation de manière disjointe’’ (C. du Tertre). En clair : la voiture est plus un outil de déplacement qu’objet de reconnaissance individuel à coût élevé. Le low cost, la location longue durée, les véhicules électriques à faible consommation-autonomie ou encore l’auto-partage. Ou encore le véhicule de plus en plus automatisé (sécurité active, systèmes connectés de navigation…) pour libérer du temps pendant le transport autre que l’action de conduire (la Google Car). Dans ces modèles, l’industriel est appelé à devenir opérateur mais également partenaire avec d’autres opérateurs. Il développe des services (financiers, notamment) autant que des voitures.
Demain, peut-être s’abonnera-t-on au transport comme on téléphone : c’est l’usage qui tire l’objet. Vendre du service et de l’usage, voilà l’objectif. Les logiciels qui tirent l’industrie informatique. Le streaming stimule l’industrie musicale. La télévision nourrit tel prestataire de téléphonie. L’industrie de la photocopie vend de la maintenance et de la location longue durée. C’est la révolution de la convergence numérique qui permet cette évolution : le contenu tire le contenant. Les activités de services sont devenues dominantes. La part des activités manufacturières dans l’économie (emploi, valeur ajoutée) a chuté. Les marchés sont saturés (matures). La logique de remplacement (l’obsolescence programmée), de multi-équipement (avoir plusieurs télévisions dans sa maison) ou de suréquipement (préférer un véhicule 4x4, par exemple) n’est pas tenable à long terme. Ces modes de consommation ne signent que la survie d’un modèle de croissance en épuisement.
Vers le management coopératif
Le défi de cette logique servicielle est à la fois industriel et organisationnel. C’est bien la performance du produit qui permet d’en développer les usages : de l’Iphone à la chirurgie à distance en passant par la robotique domestique, c’est bien l’innovation industrielle qui est développée. La maison intelligente ou les nouveaux modes de consommation d’énergie demandent en amont des investissements considérables en recherche-développement. L’autre enjeu est organisationnel. Multiplication des acteurs aux échanges de plus en plus horizontaux, place dominante du consommateur, etc. : l’économie servicielle stimule les modes de management : la coopération (organisation des contraintes) devient aussi importante que la coordination (manager) et la spécialisation (expert). La qualité informationnelle (la hiérarchisation face à la surinformation et à la faiblesse de la communication) comme la capacité de donner un sens du travail (la transmission des métiers) dans les entreprises aux activités de plus en plus diversifiées et éclatées (chaîne de production) sont au cœur de ce management. Le rôle des cadres évolue. Comme metteurs en scène de l’organisation du travail, comme garants de la coopération. A distance de l’image originelle du cadre prescripteur, organisateur et contrôleur, mais également de l’héritage gestionnaire et procédural que nous subissons depuis quelques années.
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