Vis-à-vis des cadres, le jeu dangereux des employeurs publics et privés, et de l’État !
En cette rentrée, les cadres font la Une dans plusieurs domaines.
par Laurent Mahieu, Secrétaire général de la CFDT Cadres
Les employeurs privés, d’une seule voix – celle du nouveau président du MEDEF -, se lamentent de la difficulté à attirer les jeunes sur les fonctions cadre des entreprises et, « en même temps », font piétiner la négociation interprofessionnelle sur les cadres. Cette dernière est une opportunité de refonder le contrat social élaboré par des accords successifs en 1947, en 1966 puis en 1983. Si le seul débouché de la négociation, comme le voulait le MEDEF jusqu’à présent, était de renvoyer la question de la définition des bénéficiaires de la prévoyance aux branches professionnelles, le MEDEF manquerait une belle occasion de donner par la négociation avec les confédérations syndicales un signal fort aux cadres managers et cadres experts, acteurs pivots de la performance collective et de l’engagement des salariés. La CFDT Cadres porte l’ambition d’un accord large, à la hauteur des profonds changements du monde du travail et de son organisation.
" Redisons-le ! L’assurance chômage ne fait pas de différences entre les salariés cadres ou non cadres : même taux de cotisation, même prorata d’allocation sauf pour les bas niveaux de salaires [..] "
Dans le même temps, la concertation s’ouvre sur l’assurance chômage avec, comme à chaque fois, la désignation de nouveaux boucs émissaires, ceux qui gagnent trop, ceux qui restent trop longtemps au chômage ; bref, les cadres qui attendent plus de deux ans avant de se remettre au travail … et ce du fait d’allocations chômage trop généreuses : et si l’on baissait le plafond ? Redisons-le ! L’assurance chômage ne fait pas de différences entre les salariés cadres ou non cadres : même taux de cotisation, même prorata d’allocation sauf pour les bas niveaux de salaires, un plafond de cotisation élevé permettant d’intégrer totalement la quasi-totalité des cadres. Ce système solidaire et inclusif pâtirait fortement d’une baisse du plafond, et profiterait aux uns (moins de taxe sur les très hauts salaires) au détriment des autres. Quant à la non dégressivité, les partenaires sociaux français, patronat compris, ont fait ce choix.
« JE DIS : PAS DE DÉGRESSIVITÉ POUR LES CADRES »
(Laurent Berger, RTL, 4 septembre 2018)
La dégressivité n’est pas incitative, chacun le sait. Le chômage de longue durée est le résultat de politiques trop faibles en matière de formation tout au long de la vie en entreprises et d’un accompagnement personnalisé encore trop limité. Tout le contraire du modèle danois. Dès lors, il faut du temps au temps.
Les employeurs publics, ou du moins le gouvernement, par le biais de la loi « avenir professionnel » a tenté d’imposer la possibilité de recruter sur des postes de direction des cadres issus du privé. C’était rompre le contrat social avec les cadres A et A’ des fonctions publiques en tentant d’obstruer ainsi des perspectives professionnelles. Le Conseil Constitutionnel, vigilant, a refusé la présence de cette « réforme masquée » dans une loi qui n’en avait pas l’objet, d’autant plus qu’un cadre de concertation existe en ce moment avec le ministère en charge de la fonction publique. Ce n’est que partie remise et la vigilance s’impose.
La période qui s’ouvre, sur bien des chantiers ouverts par le gouvernement, concernera les cadres : Pour eux-mêmes et ceux qu’ils managent, quel impact de la loi « avenir professionnel » ? Comment cette loi impactera la réalité des inégalités femmes / hommes ? Quels moyens nouveaux la réforme du système de santé au travail va leur donner pour être mieux encore acteurs de prévention ? Quelles perspectives la loi PACTE formulera en direction des salariés pour plus de « participation réelle » et d’intéressement à la vie même de l’entreprise à tous ses étages (du CA à l’équipe) et dans tous ses domaines (économique, social et environnemental), pour redistribuer durablement le pouvoir d’agir avant même de redistribuer les fruits économiques du court terme ? Autant de sujets sur lesquels agir ensemble. La CFDT Cadres prendra toute sa part aux côtés des managers, des ingénieurs, des experts.
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"La dégressivité n'est pas une bonne idée" (Intervention Laurent Berger sur RTL, 4 septembre 2018)
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