Jeunes et stagiaires

L’apprentissage : Nouveaux acteurs sociaux, nouveaux défis syndicaux et professionnels

07 fév 2025

Sécuriser un apprentissage de qualité passe par un travail à tous les étages pour éviter que le « soufflet retombe » : la CFDT fait le point après la réforme de 2018.


Mercredi 29 janvier, la confédération CFDT organisait pour ses adhérents un webinaire de restitution de l’étude « L’apprentissage après la réforme de 2018 : nouveaux acteurs, nouveaux défis » menée par le CEREQ à la demande de la CFDT, sur financement de l’IRES.

Menée par Marie-Hélène TOUTIN-TRELCAT et Benoît CART, l’étude portait sur l’analyse comparative des données sociales de 2017 à 2021 et sur une quarantaine d’entretiens d’acteurs divers. Cette étude fait l’objet :

Le webinaire a permis d’en présenter la synthèse et d’en fournir un commentaire CFDT de la part de Yvan RICORDEAU, secrétaire général adjoint CFDT, et d’Aurore DIJOUX, secrétaire confédérale en charge du dossier.

Pour la CFDT, l’objet de l’étude était d’évaluer les effets de la réforme systémique de 2018 pour apporter des ajustements, en gardant pour objectifs principaux un statut rénové, doublé d’un pack d’aides, d’une chaine d’accompagnement et d’un contrôle de la pédagogie.

 

L’apprentissage est un « objet social » qui éclaire bien des sujets

S’il est bien intégré dans l’entreprise, il permet de faire avancer la formation, l’organisation et le sens du travail. La présence d’un apprenti dans une équipe oblige les équipes de travail à réfléchir sur leur activité afin de savoir l’expliciter (la charte qualité de l’apprentissage dans le supérieur préconise la mise en place d’espaces de réflexion dans les entreprises).

La loi est incitative sur la formation des Maîtres d’Apprentissage : le "savoir transmettre" s’apprend ! Des branches ont fait de la rendre obligatoire, d’autres pas. Dans les PME, il semble plus compliqué de former les maîtres d’apprentissage (les TPE-PME représentent 70 % des contrats). Et pourtant, il y a de bons retours des formations et cela amène de la réflexion au sein des équipes. Il y a un enjeu à sauter le pas qui permet ensuite de réfléchir à l’organisation générale du travail pour intégrer l’apprentissage ; repenser les attendus, le droit à l’erreur, etc.

L’accompagnement est le parent pauvre de la réforme de l’apprentissage, avec ses acteurs multiples et souvent « néophytes » : La charge de faire le lien entre le CFA et l’entreprise revient trop souvent à l’apprenti. La loi n’a pas institué de véritable obligation de se coordonner alors qu’il y a une nécessité à renforcer l’équipe tutorale.

Sécuriser un apprentissage de qualité passe par un travail à tous les étages pour éviter que le « soufflet retombe » :

  • Renforcer le dialogue social par des accords d’entreprise ou de branche,
  • Articuler la relation CFA–entreprises : s’en saisir au niveau des branches et des Opco (qui disposent désormais de pouvoir de contrôle et coercition),
  • Former des maitres d’apprentissage,
  • Intégrer l’apprentissage dans les plans de développement des compétences,
  • Instituer le dialogue professionnel au cœur des équipes pour articuler les différents postes ; et articuler dialogue social et dialogue professionnel pour « tirer les bons fils »,
  • Au niveau régional, s’impliquer sur les enveloppes de financement qui peuvent faire l’objet de critères ; utiliser la possibilité de flécher vers l’accompagnement.

 

Le taux de rupture des contrats

Un point d’attention sensible pour l’acteur syndical est celui du taux de rupture des contrats d’apprentissage, signe d’un échec aux causes multiples. Les chercheurs soulignent que le taux de rupture dans le secondaire régresse alors qu’il augmente dans le supérieur. Il y a sûrement une corrélation avec l’arrivée plus forte de nouveaux acteurs dans le supérieur :

  • Des nouveaux CFA pas tous investis,
  • Des entreprises sans culture de l’apprentissage où les maitres ne sont pas formés et désignés volontaires,
  • Les profils des jeunes très matures (qui optimisent la rupture pour changer d’entreprise) et des jeunes beaucoup fragiles (qui sont passés du secondaire au supérieur).

En conclusion, Yvan Ricordeau précisait que la réforme allait dans le bon sens, qu’elle a réévalué l’image de l’apprentissage mais doit être pilotée à trois niveaux au service du développement des qualifications et des compétences :

  1. France Compétences,
  2. La régulation des niveaux de prises en charge par les branches et les OPCO,
  3. Les entreprises doivent maitriser le dispositif et en négocier les conditions d’exercice (formation et accompagnement des maitres, espace de dialogue professionnel, etc.).

En complément, sur ce sujet, on pourra :

 

par Laurent MAHIEU, chargé de mission CFDT Cadres

 

Illustration : shutterstock